jeudi 8 juin 2017

Alien : Covenant (2017)

Titre : Alien: Covenant

Date de sortie française : 10 mai 2017

Réalisateur : Ridley Scott

Scénario : Michael Green, Jack Paglen, John Logan et Dante Harper d'après les personnages créés par Dan O'Bannon et Ronald Shusett

Photographie : Dariusz Wolski

Montage : Pietro Scalia

Musique : Jed Kurzel

Durée : 2h02

Avec : Michael Fassbender, Katherine Waterston, Billy Crudup, Danny McBride, Demián Bichir, Carmen Ejogo, Jussie Smollett, Callie Hernandez

Synopsis Les membres d’équipage du vaisseau Covenant, à destination d’une planète située au fin fond de notre galaxie, découvrent ce qu’ils pensent être un paradis encore intouché. Il s’agit en fait d’un monde sombre et dangereux, cachant une menace terrible. Ils vont tout tenter pour s’échapper. (Source : Allociné)


Mon avis



S'il y a bien quelque chose qu'on ne peut enlever à Ridley Scott, c'est son activité dans le milieu. Sur plein de projets à la fois (les différentes préquels + éventuelles suites de Alien, Blade Runner 2049), le réalisateur britannique a rarement été autant actif malgré l'aube de ses 80 ans qui se profile devant lui.
Pourtant, pour beaucoup, Ridley Scott a perdu le mojo, le public prenant un malin plaisir à conchier sur tout ce qui sort de l'esprit du cinéaste (parfois à raison mais souvent à tort d'ailleurs). Prometheus n'avait d'ailleurs pas échappé à ce bashing. Le film, qui était annoncé comme un préquel à Alien: Le 8ème passager, avait énormément déçu les fans qui ont reproché au film de trahir l'esprit du film qui a rendu Ridley Scott célèbre. Or, c'était exactement ce qui était réussi dans Prometheus : cette manière d'aborder un univers d'une autre manière, beaucoup plus mythologique et créationniste, tout en ouvrant des possibilités nouvelles (rappelons que Prometheus était le premier film de Scott en numérique et en 3D native !).

Avec Alien: Covenant - qui aura d'ailleurs changé plusieurs fois de nom en cours de production, passant de Paradise à Paradise Lost (tiens tiens !) puis à Covenant - Ridley Scott continue son exploration de l'univers des xénomorphes  en proposant à la fois une suite à Prometheus et un rattachement à Alien: Le 8ème passager pour un résultat plutôt satisfaisant dans l'ensemble, bien que le film souffre de grosses faiblesses.


Dans toute la première partie, ce qu'il se passe devant nos yeux est pourtant excellent, à l'image de cette séquence d'introduction austère, très scottienne dans l'esprit et enjolivée par le (à nouveau) très beau travail photographique de Dariusz Wolski. Cette première séquence porte sur la création, le rapport entre celui qui crée et celui qui est créé. Le film rejoint ici directement Prometheus dans ses thématiques et ses personnages.
Puis, sans crier gare, nous sommes projeté dans l'espace, la caméra de Scott glisse le long de l'USCSS Covenant tandis que Walter (le double de David, également interprété par le toujours autant envoûtant Michael Fassbender) déploie un immense écran à l'avant du vaisseau lors d'une séquence où Ridley Scott démontre tout de suite la maîtrise formelle de son sujet.

Car oui, tout comme l'était Prometheus, Alien: Covenant est beau. Ridley Scott a toujours accordé beaucoup d'importance au visuel de ses films (il sort d'ailleurs de la même école qu'un certain...Michael Mann !) et cette dernière cuvée ne déroge pas à la règle.
Comme déjà mentionné, toute la première heure est excellente à tous les niveaux : mise en contexte, présentation des nouveaux personnages (sur lesquels nous reviendrons) et très rapidement les premiers problèmes. Scott démontre ici qu'il n'a pas perdu son talent pour créer de la tension, notamment lors d'une séquence assez folle (et très sanglante) qui voit l'apparition à l'écran du premier Neomorph.

La relation particulière entre Walter et David est particulièrement réussie, la séquence de la flûte est notamment un exemple de mise en scène simple et qui fait passer énormément de choses sans trop en dire. On pourra regretter qu'aucun autre personnage n'attire vraiment d'empathie mais il s'agit surtout d'un choix de Ridley Scott (qui n'a jamais véritablement aimé ses personnages dans ses films) afin qui le spectateur ressente la même amertume envers ces personnages que David a envers les hommes.


Cependant, si toute cette fameuse première partie brille par son intelligence et sa mise en scène, le soufflé retombe clairement dans une seconde moitié beaucoup moins inspirée où Ridley Scott tombe à plusieurs moments dans les travers du fan-service sans réelle saveur. Si on peut lui pardonner le fait qu'il ne fait pas reposer la peur sur le fait de ne pas voir le xénomorphe (nous ne sommes plus dans le premier film, tout le monde connaît l'Alien et remonter un suspens là-dessus aurait été ridicule) et le fait que ce même xénomorphe ne soit pas le vrai antagoniste du film, difficile de laisser passer certaines fautes de goût, que ce soit sur le design de la créature elle-même ou quelques ratés dans les effets spéciaux que l'on attribuera au budget (très inférieur à celui de Prometheus).

Mais surtout, le film peine à vraiment passionner une fois passée l'heure de métrage, la faut à un récit en roue libre. Rajoutons à ça quelques choix de montage vraiment douteux (dont un flashback au milieu du film qui n'a rien à faire là et quelques ellipses pas très inspirées) et une dernière demi-heure qui tombe, pour le coup, dans le too much visuel typique d'un film de studio qui veut en mettre plein les yeux, et l'équilibre qu'avait instauré Scott jusque -là s'en retrouve fortement ébranlé.

C'est là le grand drame de Alien: Covenant, un film maîtrisé sur beaucoup d'aspects mais plombé par un récit qui peine à véritablement se trouver et un certain mauvais goût visuel qui fait tâche chez un puriste de l'image tel que Ridley Scott. Il est certain que le film aura beaucoup de peine à réconcilier les détracteurs de Prometheus avec cette série de préquels. Une question demeure pourtant : qu'a encore à raconter Scott dans cet univers ? La fin de Covenant, grossière, montre déjà les limites de l'exploration des xénomorphes et on ne peut s'empêcher de penser qu'il faudrait peut-être mieux en rester là.