dimanche 25 décembre 2016

Rogue One : A Star Wars Story (2016)

Titre : Rogue One: A Star Wars Story

Date de sortie française : 14 décembre 2016

Réalisateur : Gareth Edwards

Scénario : Chris Weitz et Tony Gilroy, d'après une histoire de John Knoll et Gary Whitta. Basé sur les personnages créés par George Lucas

Photographie : Greig Fraser

Montage : John Gilroy, Colin Goudie et Jabez Olssen

Musique: Michael Giacchino

Durée : 2h14

Avec : Felicity Jones, Diego Luna, Alan Tudyk, Donnie Yen, Wen Jiang, Ben Mendelsohn, Forest Whitaker, Riz Ahmed, Mads Mikkelsen, Jimmy Smits

Synopsis Dans une période de guerre civile, les populations doivent faire face à la nouvelle arme de l'Empire galactique, l'Étoile de la mort. Cette nouvelle arme fait également office de base militaire, elle est capable d'anéantir des planètes entières. Un groupe de résistants s'unit pour en voler les plans. Agissant pour le compte de l'Alliance rebelle, une jeune femme solitaire (Jyn Erso) est chargée de cette mission-suicide, aidée par son coéquipier (le capitaine Cassian Andor) et par une équipe de mercenaires ainsi que par un ancien droïde impérial. Leur périple les conduira sur différentes planètes comme Jedha, une planète ayant abrité les premiers adeptes de la Force ou encore la planète tropicale Scarif, contrôlée par l'Empire et disposant d'une installation militaire importante. En chemin, ils seront confrontés aux forces impériales, équipées d'immenses véhicules terrestres (AT-ACT) et de vaisseaux spatiaux. Sous les ordres directs du cruel directeur Orson Krennic qui contrôle la mise en place de l'Étoile de la mort, les stormtroopers impériaux, les Shoretroopers et les Death troopers doivent à tout prix repousser les rebelles. Le terrible Dark Vador supervise en effet de près les opérations. (Source : Wikipédia)


Mon avis


ATTENTION : Cet article contient de légers spoilers !

Avec le rachat de Lucasfilm par Disney, la folie Star Wars est repartie de plus belle grâce à (à cause de ?) la marvelisation subie par la franchise qui aura désormais droit à un nouvel épisode principal tous les deux ans, entrecoupé de spin-off qui sortiront entre deux films de la nouvelle trilogie.
"Au cours de la bataille, les Rebelles ont réussi à dérober les plans secrets de l'arme absolue de l'Empire: l'ETOILE NOIRE, une station spatiale dotée d'un armement assez puissant pour annihiler une planète tout entière". C'est sur cette simple phrase contenue dans le célébrissime texte déroulant du premier Star Wars qu'est basé toute l'histoire de ce premier A Star Wars Story, à savoir les péripéties de Jyn Erso (Felicity Jones) et plusieurs autres membres de la Rébellion pour voler les fameux plans de l'étoile Noire qui était au centre de Un Nouvel Espoir.

Un an après le médiocre Episode VII tellement enfermé dans son fan-service qu'il en oubliait de faire quelque chose de véritablement original et intéressant, l'arrivée de Gareth Edwards sur le projet était à la fois enthousiasmant et inquiétant. Enthousiasmant car Edwards est l'auteur de l'excellent Monsters, film de science-fiction a très petit budget qui avait charmé par sa beauté et son traitement des personnages. Inquiétant parce que ce même Edwards s'est fait totalement saboter sur son Godzilla qui avait été une très grosse déception et que de le voir à nouveau à la tête d'un projet où il n'avait que peu de chances de pouvoir imposer totalement son style n'était pas forcément rassurant.


On le sait, la genèse de Rogue One : A Star Wars Story a été très chaotique, le film ayant dû subir de nombreux reshoots (on parle de 40% !) après une première version n'ayant apparemment pas du tout plu à Disney. C'est le médiocre Tony Gilroy qui s'est occupé de ces reshoots (tandis que son frère John s'est occupé du montage) alors qu'il avait déjà effectué le même travail sur Godzilla. Le problème, c'est que tous ces soucis ne pouvaient pas aboutir à un bon film et se ressentent tout au long de celui-ci tant il est schizophrène. Ainsi, la première partie (une interminable exposition) doit fait partie de ce qui se fait de pire au niveau de la gestion du rythme. Une si longue exposition pour finalement n'avoir aucun véritable approfondissement des personnages relève clairement d'un gros problème d'écriture car oui, les personnages de Rogue One sont tous plus insipides les uns que les autres, un comble pour une franchise qui a toujours eu son lot de personnages emblématiques et charismatiques.
Le problème des protagonistes de Rogue One, c'est qu'il sont uniquement fonctionnels, il n'y pas de réel développement ce qui limite toute empathie à leur égard. Ceci fait que la disparition de ceux-ci (car le film est très meurtrier à ce niveau-là) ne provoque aucune émotion particulière.

Une fois passé cette première partie extrêmement pénible (difficile de garder l’œil ouvert), le film commence enfin et prend déjà un peu plus d'ampleur. Ce n'est véritablement que lors de la grande bataille finale que Gareth Edwards peut enfin montrer l'étendue de sa mise en scène. Alors ce n'est pas non plus quelque chose d'exceptionnel mais l'idée de filmer cette fameuse bataille sur plusieurs plans (en orbite, sur les plages et dans la tour où sont situés les plans de l'Étoile noire) est plutôt bonne car elle donne une véritable sensation de vertige par moments. Cette seconde partie du film est également plus intéressante car ça devient alors une vraie "guerre des étoiles" mais dans le style de Edwards, caméra à l'épaule et le plus souvent proche des personnages mais en gardant tout de même une certaine pudeur à leur égard.


Ce dernier acte est aussi l'occasion pour Gareth Edwards d'aborder certaines des thématiques dont il est accoutumé comme la peur d'une catastrophe nucléaire. Les séquences où l'Étoile Noire envoie son rayon sont assez parlantes à ce niveau-là, il y a d'ailleurs un très beau plan vers la fin du film où l'onde de choc se rapproche de Jyl et Cassian au loin. Malheureusement, cette séquence n'a quasiment aucun impact émotionnel à cause, une nouvelle fois, du manque total d'empathie envers les personnages.

C'est d'autant plus pénalisant que les enjeux du film sont déjà connus par quiconque ayant vu Un Nouvel Espoir au moins une fois dans sa vie. C'est-à-dire que le ce spin-off aurait tout gagné à déplacer ses enjeux du côté de ses personnages en les approfondissant bien plus que ce n'est le cas. Il y a des tentatives intéressantes comme le personnage incarné par Donnie Yen qui apporte sa maîtrise des arts martiaux à la franchise mais qui n'est pas assez exploité pour être vraiment marquant (en plus d'être assez insupportable à répéter tout le temps la même chose). L'idée d'avoir un véritable commando suicide est aussi bonne mais sans personnages attachants ça perd un peu de son intérêt.
Le personnage le plus réussi est finalement Dark Vador malgré son temps de présence à l'écran très limité mais son aura est telle qu'il vole sans trop de problème la vedette aux autres protagonistes. C'est notamment le Seigneur Sith qui aura droit à la meilleure séquence du film, très tournée vers le fan-service certes, mais vraiment réussie.


On pourra regretter aussi que Michael Giacchino (qui a remplacé au pied levé Alexandre Desplat parti en cours de production) n'ait eu qu'un peu plus de 4 semaines pour composer les musiques du film, tant celles-ci manquent d'envergures et restent trop prisonnière de l'aura de John Williams, sans jamais réussir à les transcender. A nouveau, la production chaotique se ressent sur la qualité du travail car on ne peut pas décemment demander des merveilles à un compositeur en si peu de temps.

C'est là toute la tragédie de Rogue One: A Star Wars Story : un film avec énormément de potentiel qui aurait pu s'imposer comme l'un des meilleurs épisodes de son illustre franchise mais qui pèche par de trop nombreux problèmes : une exposition interminable, des personnages transparents, des choix douteux (le nouveau robot-droïde censé être le comic relief de l'histoire)...
Pourtant, il serait difficile d'en vouloir à Gareth Edwards qui a été dépossédé de son film et dont la seule faute serait, en étant un poil cynique, d'avoir accepté le projet. Les moments où sa réalisation parvient enfin à s'exprimer contiennent de très bonnes choses et permettent tout de même au film de se placer dans la moyenne plutôt haute des blockbusters de cette année (assez abominable pour le genre) et également au-dessus de l'Episode VII et son fan-service incessant.

Maintenant, ce serait bien que Kathleen Kennedy et les exécutifs de chez Disney accorde plus de confiance à leurs réalisateurs car en prendre des prometteurs pour ensuite les brider totalement n'est pas une démarche vraiment plus glorieuse que de prendre un yes-man qui vous obéira au doigt et à l’œil...


jeudi 15 décembre 2016

(Re)visionnages récents - 5


X-Men: Days of Future Past, the Rogue Cut (2015) - Bryan Singer


Alors que j'avais déjà adoré Days of Future Past lors de sa sortie au cinéma en 2014, je n'avais pas encore eu l'occasion de regarder la Rogue Cut, montage alternatif avec une durée augmentée de 17 minutes qui présente le film tel que Bryan Singer l'avait pensé à l'origine.
Comme son nom le laisse présager, cette version alternative met le personnage de Malicia (Anna Paquin) bien plus en avant que la version cinéma dans laquelle elle n'apparaissait qu'en tant que caméo à la toute fin.
La principale différence avec le montage d'origine est l'inclusion de deux séquences inédites : l'une présente un dialogue pas forcément intéressant entre Mystique (Jennifer Lawrence) et le Fauve (Nicholas Hoult). Par contre, toute la séquence inédite du sauvetage de Malicia permet à Singer de se faire vraiment plaisir en proposant un montage alterné entre Magnéto vieux (Ian McKellen) qui s'infiltre dans le manoir avant d'échapper aux Sentinelles et son homologue jeune (Michael Fassbender) qui s'en va récupérer son casque.
La séquence avec Fassbender était déjà présente dans la version cinéma mais le nouveau montage fait gagner toute la scène en rythme, en plus de la réalisation toujours maîtrisée de Bryan Singer.
Je dois dire que cette version Rogue Cut me conforte dans mon idée que Days of Future Past est sans aucun doute le meilleur film de super-héros depuis Watchmen. La vision d'auteur que Singer injecte dans ses films fait vraiment du bien au milieu de la masse informe de blockbusters super-héroïques qu'on nous balance à la figure actuellement. Des séquences comme celle des portails ou de Quicksilver j'en redemande, et je veux que ce soit un type comme Bryan Singer, qui sait filmer l'action sans jamais tomber dans l'exagération, qui me l'apporte.


Pusher (1996) - Nicolas Winding Refn


Depuis le triomphe de Drive, chaque film de Nicolas Winding Refn est attendu au moins autant qu'il divise à sa sortie. Son esthétisme à outrance charme les uns et à tendance à en agacer d'autres. Pourtant, à ses débuts, le cinéma de Refn n'était pas encore exactement celui que l'on connaît aujourd'hui, même si on pouvait déjà y déceler certains signes précurseurs.
Ayant de grosses lacunes dans la filmographie du cinéaste, je me suis lancé plein d'enthousiasme dans son premier film, Pusher, premier volet d'une trilogie extrêmement appréciée des cinéphiles.
Et il faut dire que c'est une petite claque ! Filmé intégralement en caméra à l'épaule, Refn nous emmène au cœur du quotidien d'un trafiquant de stupéfiants à Copenhague. Étalé sur une durée de une semaine, le film est magnifiquement bien rythmé et embelli par la réalisation de Refn et ses très longs plans, on a peut-être là le meilleur long-métrage jamais tourné en caméra-épaule, rien que ça ! Comme je l'ai dit, on y voit déjà apparaître certains éléments visuels qui deviendront si chers au cinéaste par la suite, particulièrement cette attirance pour les néons et les lumières très vives (beaucoup de scènes se passent dans des bars ou des boites de nuit illuminées de toutes parts) qui contrastent avec la grisaille extérieure de la capitale danoise.
Il y a aussi ce casting de "gueules" : Mads Mikkelsen bien entendu mais surtout Kim Bodnia qu'on ne lâchera pratiquement pas d'une semelle durant ses péripéties. Un gros tour de force pour un premier film !


Pusher 2 : Du sang sur les mains (2004) - Nicolas Winding Refn


Essai transformé pour Nicolas Winding Refn ! Après l'échec cuisant enregistré par Inside Job, sa première réalisation en langue anglaise avec John Turturro, le réalisateur danois revient dans son pays natal pour faire une suite à son premier film. Pusher 2 se concentre cette fois-ci sur le personnage de Tonny (Mads Mikkelsen), l'ami du protagoniste principal du premier Pusher, qui vient de sortir de prison et qui retourne chercher du boulot auprès de son père, un gangster sans scrupules.
Si je parle d'essai transformé, c'est que le film réussi la prouesse d'être au niveau du premier alors que NWR lui-même avait peur de ternir le succès de son premier film. L'histoire est à nouveau racontée du point de vue du personnage principal avec cette incroyable caméra à l'épaule hyper dynamique qui permet, comme dans Pusher premier du nom, de maintenir un rythme effréné tout du long. C'est simple, jamais on ne s'ennuie, il se passe toujours quelque chose alors que l'on suit Tonny dans cette Copenhague froide, toujours représentée de manière très peu accueillante par Refn.
Si Inside Job prenait à contre-pied ce qu'il avait fait jusque là avec un rythme très lent des des plans très fixes (à se demander parfois s'il s'agissait bien du même réalisateur que Pusher et Bleeder), Refn revient ici à ses premiers amours avec toujours cette attirance pour les ambiances nocturnes et les lumières rouges (ça doit d'ailleurs être son film qui en contenait le plus jusque là), il imprime de ce fait sa patte si particulière sur le métrage et augure déjà un peu le tournant ultra esthétique que prendra sa carrière quelques années plus tard. Un grand film !


Pusher 3 : L'ange de la mort (2006) - Nicolas Winding Refn


Pour conclure sa trilogie, Nicolas Winding Refn décide cette fois-ci de suivre un des personnages secondaire des deux premiers volets, Milo (Zlatko Buric), un baron de la drogue serbe qui doit s'occuper d'organiser l'anniversaire de sa fille qui fête ses 25 ans.
Comme les deux premiers Pusher, l'histoire tourne autour du trafic de stupéfiants à Copenhague avec une réalisation toujours aussi maîtrisé caméra-épaule de Refn (ce sera d'ailleurs son dernier film à être tourné de façon aussi nerveuse).
Le film est clairement le moins bon des 3, principalement parce que le personnage principal souffre un peu de la comparaison avec Kim Bodnia et, surtout, Mads Mikkelsen. Alors certes il a de la présence en raison de sa carrure, mais il en imposait clairement plus quand il était un personnage secondaire, surtout dans le premier. Après ça reste très bon, Refn a le mérite d'avoir fait 3 films très semblables formellement parlant mais avec à chaque fois un autre personnage au centre de son histoire (là où, de nos jours, les trilogies suivent généralement le parcours d'un unique protagoniste principal).
Si l'attirance de Refn pour les personnages déviants n'est pas sans rappeler un certain Martin Scorsese, la froideur avec laquelle celui-ci filme Copenhague lorgne plutôt du côté de chez Kubrick (qui sera d'ailleurs son influence principale pour Bronson). Avec sa trilogie, le cinéaste danois s'est pourtant forgé son propre style, qu'il tournera de plus en plus vers l'ultra-esthétisme par la suite.


Midnight Special (2016) - Jeff Nichols


Alors que je l'attendais avec une grande impatience, Midnight Special n'a jamais daigné montrer le bout de son nez dans les salles romandes. Ayant enfin eu l'occasion de le voir, je peux enfin donner mon avis sur la première plongée de Jeff Nichols dans la science-fiction.
Si j'ai moins apprécié dans l'ensemble que Take Shelter qui est pour l'instant mon Nichols préféré, le réalisateur nous livre ici un très bon film de science-fiction, très spielbergien et avec toujours ce petit soupçon de Malick que le réalisateur arkansasais aime tant. Comme souvent chez Nichols, le film nous plonge directement dans le feu de l'action : on ne sait pas vraiment où on est, qui est ce jeune garçon, on sait juste que lui et son père biologique sont poursuivis par la police pour enlèvement.
Là où bon nombre de gros films de science-fiction actuels tentent par tous les moyens de nous en mettre plein la vue, Midnight Special a le mérite de ne pas trop en montrer jusqu'à la toute fin. On ne sait pas vraiment d'où proviennent les pouvoirs du gamin et quelle est véritablement sa missions.
Mais surtout, c'est beau, c'est très beau même, comme on en a pris l'habitude avec Jeff Nichols. Certains plans aériens notamment m'ont vraiment soufflé, tout comme la partie finale, très impressionnante mais que j'ai également trouvé très poétique.
Je retiens aussi une excellente bande-son qui accompagne très bien la tension (car il y en a, encore une chose que le réalisateur maîtrise bien).
Je reprocherais au film au défaut en particulier, c'est un problème de rythme vers le début du film, les premières scènes avec Adam Driver notamment (alors qu'il est très bon, là n'est pas le souci) qui ne font pas vraiment avancer l'histoire.
Midnight Special est de nouveau une réussite pour Jeff Nichols qui nous livre un film de science-fiction se recentrant sur l'essentiel : la cellule familiale et l'amour d'un père pour son enfant...De quoi attendre avec une certaine impatience Loving, le prochain film du réalisateur qui a d'ailleurs déjà été présenté à Cannes cette année.


Zootopie (2016) - Byron Howard, Rich Moore & Jared Bush


Gros carton de ce début d'année, Zootopie était intéressant sur le papier car il marquait le retour de Disney à un genre qui a donné naissance à de très grands films : l'anthropomorphisme.
La seule bande-annonce (qui était plutôt un extrait) que j'avais vu, avec le paresseux m'avait bien fait sourire et j'étais donc curieux de voir le résultat final.
Finalement, le film est un peu à l'image de ce que fait Disney depuis quelques années : c'est beau, c'est plutôt sympa mais ça reste très classique !
On suit en effet le parcours le Judy, premier lapin à intégrer le service de police de la ville de Zootopie où ne vivent que des animaux. Elle va devoir prouver sa valeur et va vite se retrouver confronter à une histoire d'enlèvement et d'animaux qui deviennent enragés (les prédateurs), elle va donc s'attacher les services de Nick, un renard spécialisé dans les arnaques (et dont le design m'a beaucoup fait penser à Fantastic Mr. Fox) pour résoudre cette affaire.
Et le problème, c'est justement que le métrage suive un schéma totalement classique d'enquête policière où au final, des personnages présentés comme gentils vont finalement s'avérer être de grands méchants.
Surtout que, arrivé à la fin du film, pas grand chose n'a changé, tout le monde se retrouve pour danser sur du Shakira mais il n'y a pas de réelle remise en question (principalement concernant le travail de la police ou de cette "utopie" qui n'en est pas vraiment une).
A la fin je me suis donc retrouvé à me dire "meh", c'est certes très solide techniquement et la direction artistique a un charme certain, mais je n'ai pas eu l'impression d'avoir vraiment quelque chose de neuf devant les yeux et c'est vraiment dommage.


Une histoire vraie (1999) - David Lynch


Finissant petit à petit la filmographie de David Lynch, il me restait un film que je n'avais pas encore vu de lui, celui relatant l'histoire vraie (comme le titre pouvait potentiellement mettre la puce à l'oreille) d'un vieillard de 73 ans qui va parcourir plus de 550km au volant d'une tondeuse à gazon pour aller rendre visite à son frère qui a été victime d'un infarctus.
Je n'en attendais pas grand chose pour tout dire, je savais que c'était un film passablement éloigné du style très torturé du cinéaste et beaucoup plus accessible qu'un Lost Highway ou un Mulholland Drive pour ne citer qu'eux.
Eh bien quel coup de coeur ça a été ! Lynch nous livre ici un magnifique road-trip, assez extravagant vu le moyen de locomotion utilisé par Alvin Straight mais d'une beauté sans pareil.
Je ne m'étais jamais attaché autant rapidement à un personnage, il faut dire que Richard Farnsworth livre une prestation incroyable de justesse en faisant passer énormément d'émotion par son regard. Plusieurs fois j'ai eu la larme à l'oeil en voyant Alvin croiser sur sa route différentes personnes à qui il raconte sa vie, ses bonheurs mais également ses malheurs, sans que jamais il ne soit jugé de telle ou telle manière. Le tout est agrémenté de la magnifique musique de Angelo Badalamenti qui souligne à merveille l'ambiance très mélancolique qui se dégage de cette virée parmi ces paysages si sublimement mis en avant par David Lynch.
Une histoire vraie est un film très simple dans sa forme mais avec un gros travail de fond derrière. Si jusqu'alors, Blue Velvet avait ma préférence dans la filmographie de Lynch, celui-ci vient de se faire chiper sa place par ce pur morceau de cinéma, ce pur morceau de beauté. Un chef-d'oeuvre !


Holy Motors (2012) - Leos Carax


Difficile de parler d'un tel film, tant son étrangeté risque d'en laisser pas mal sur le carreau. Ne connaissant pas Leos Carax, mais étant familier avec la très bonne réputation du film, je me suis donc lancé avec curiosité et j'ai vraiment aimé, sans être une claque non plus.
Pendant tout le film, nous suivons une journée de M. Oscar (Denis Lavant), un homme dont le métier est de changer constamment d'apparence, de se mettre dans la peau de différents personnages afin d'aller à plusieurs rendez-vous. Tout le film, ou presque, se construit donc sur le schéma M. Oscar monte dans la limousine - il est informé de son prochain rendez-vous - il se prépare, se déguise - va au rendez-vous - remonte dans la limousine - etc. Ce qui est très fort, c'est la performance de Denis Lavant qui arrive à nous faire croire à tous les personnages qu'il incarne, que ce soit un père de famille, un tuer professionnel, Merde (un personnage tiré du court-métrage du même nom de Carax), même un vieux sur son lit de mort qui est saisissant de réalisme alors qu'on sait qui est la personne se cachant sous le maquillage. Lavant effectue en fait le travail que fait un acteur traditionnel sur plusieurs films mais le concentre en un seul métrage mais garde quand même une certaine distance avec ses personnages (si ceux-ci meurent, M. Oscar reste en vie, la séquence du tueur est d'ailleurs assez représentative de cet aspect).
Alors certes, toutes les saynètes ne se valent pas - j'ai adoré la séquence des égouts et l'entracte aux accordéons (juste génialissime !) mais j'ai par contre moins aimé la séquence avec Kylie Minogue ou celle du vieil homme que je trouve vraiment trop longues pour ce qu'elles racontent.
Une chose est sûre, c'est que Leos Carax sait mettre en scène son histoire (la scène du studio d'animation est assez folle visuellement) que je ne me risquerai pas à essayer d'interpréter, si tant est qu'il existe une interprétation. Un film que je conseille pour son concept et le formidable Denis Lavant.


Warcraft : Le Commencement (2016) - Duncan Jones


Incroyable...j'en reste sans voix. Il y a de ces films dont vous n'attendez absolument rien, éventuellement qu'ils soient un poil divertissant et dont vous ressortez quand même déçu. Disons-le tout de suite, Warcraft : Le Commencement en fait partie, tant nous tenons là une des pires merdes de l'année.
C'est effarant. On te balance dans l'histoire sans aucun développement des personnages, on ne sait pas où on est, qui sont ces gens, moi qui n'ai jamais joué à Warcraft je n'ai absolument rien pigé à quels étaient les enjeux de ce gros bordel. Là on est face à un film sans doute prévu pour faire plaisir aux fans mais j'ai horreur de ça ! Un film, même tiré d'un autre média, devrait pouvoir réussir à contenter tout le monde, pas cracher à la gueule de ceux qui débarquent.
Pis mon dieu qu'est-ce que c'est moche, entre les orcs tous plus ignobles les uns que les autres, des CGI parfois à la ramasse, rien n'est vrai, ce ne sont que des personnages vides qui s'excitent devant des fonds verts dégueulasses.

Pis ce n'est pas l'immense profondeur des personnages (et du casting surtout) qui va sauver ça quand on voit la gueule du roi et de la reine qui n'ont l'air d'avoir aucune idée de ce qu'ils foutent là, la femme mi-orc, mi-humaine (appelons-là humorc, j'ai oublié son nom de toute manière) qui après quelques heures s'attache au personnage principal et réciproquement.
Et le gros méchant orc alors, qu'est-ce qu'il branle pendant la grosse bataille finale (qui d'ailleurs se fait complètement sodomiser par n'importe quel affrontement du Seigneur des Anneaux) ? Tout le monde se tape dessus mais lui on ne le voit jamais sauf quand il faut venir gueuler sur ses soldats, il est quand même censé être surpuissant le mec...On a même droit au roi qui prend le temps, alors que toute son armée se fait égorger autour de lui, de débiter les banalités habituelles à l'humorc sur comment elle doit prendre le relai, qu'il se sacrifie, blablabla...
Mes yeux et mon corps entier n'étaient pas prêts pour ça, je n'ai pas de mots...et le pire c'est qu'il y aura sûrement une suite vu le sous-titre français du film. Duncan Jones aurait vraiment dû rester éloigné de ces conneries.


Croix de fer (1977) - Sam Peckinpah


Je ne suis pas un fin connaisseur du cinéma de Sam Peckinpah, le seul souvenir que j'ai d'un de ses films concerne Les Chiens de paille mais c'est vraiment lointain.
Je me suis donc attaqué à un de ses derniers films, considéré comme le plus abouti de sa riche carrière : Croix de fer.
Premier fait original à constater, le film se positionne du côté Allemand, peu après la Bataille de Stalingrad, sur le front russe. On y suit l'unité du Sergent Rolf Steiner (campé par le formidable James Coburn), chef désabusé, cynique, opposé à l'idéologie nazie et qui estime n'avoir de comptes à rendre à personne si ce ne sont ses hommes qu'il apprécie comme sa propre famille.
Ce qui est génial, c'est qu'on s'attache vite à Steiner et à ses hommes, on veut qu'ils survivent alors que les soldats de l'armée allemande sont plutôt dépeints comme les méchants de l'histoire dans bon nombre de films traitant de la Seconde Guerre mondiale. Peckinpah n'en fait pas pour autant un film manichéen, des salauds il y en a des deux côtés (dont notamment l'officier allemand qui convoite la croix de fer plus que tout)

Le film met toutefois une baffe visuelle assez folle, tant le réalisateur californien est un patron de la mise en scène. Croix de Fer est certainement le film de guerre le plus réaliste qu'il soit, que ce soit dans sa façon de reconstituer l'armement (Peckinpah a notamment réussi à utiliser les vrais tank soviétiques utilisés durant la guerre) ou dans sa manière de filmer les combats. Son utilisation des ralentis est toujours autant pertinente afin d'appuyer encore plus la violence des affrontements (car le film est très violent), il n'hésite pas non plus à suivre les soldats caméra à l'épaule dans un style quasi-documentaire pour nous emmener au coeur de l'action.

Croix de Fer est un film de guerre majeur et demeure, même 40 ans après, d'une modernité assez incroyable. Le film n'a pas pris une ride et continue d'influencer certains réalisateurs qui s'essaient au genre (comme le récent Fury de David Ayer). Un chef-d'oeuvre que je ne peux que vous conseiller !


Swiss Army Man (2016) - Daniel Scheinert et Daniel Kwan


Au menu des étrangetés qui avaient attiré ma curiosité, Swiss Army Man figurait en tête de liste. Premier long métrage des Daniels (primés pour leur mise en scène au Festival Sundance) comme ils s'appellent eux-mêmes, le film relate l'histoire d'un homme, Hank (Paul Dano), échoué sur une minuscule île déserte et qui tente de se suicider. Il fait alors la connaissance d'un cadavre pétomane pas vraiment mort nommé Manny (Daniel Radcliffe) avec qui il va se lier d'amitié. Le macchabée va également révéler avoir certains pouvoirs qui vont aider  Hank à survivre et retrouver la civilisation (d'où le titre du film qui fait références aux célèbres Swiss Army Knives ou couteaux suisses dans la langue de Molière).
Au vu de ce synopsis complètement hallucinant et de la bande-annonce, je m'attendais à un truc absurde à souhait, il s'avère que c'est au final une espèce de patchwork des différentes idées que l'on retrouve dans les courts-métrages réalisés par les Daniels.
Le film est certes drôle mais il est raconté d'un ton plutôt sérieux, comme si les cinéastes avaient tenté de livre une sorte de poésie absurde et décalée. Le problème c'est que ça ne marche pas tout le temps, surtout quand c'est accompagné de certaines réflexions pas franchement subtiles. Il n'empêche que les deux réalisateurs montrent un certain talent de mise en scène et que l'alchimie entre Dano et Radcliffe fonctionne vraiment bien. Il en résulte certains passages très drôles, certaines belles séquences mais également d'autres plus déconcertantes.
Si le concept est vraiment respecté du début à la fin, je ne peux m'empêcher de ressentir une certaine déception, je pense que j'aurais préféré un film sans queue ni tête où il n'y a aucun question à se poser sur ce que l'on voit à l'écran (comme le fait bien Quentin Dupieux par exemple). Le film reste quand même une expérience vraiment agréable que je conseille ne serait-ce que pour son concept assez génial.


Ma Loute (2016) - Bruno Dumont


Dans le paysage cinématographique français, Bruno Dumont est un cas particulier, une exception, une des pattes les plus reconnaissables qu'il soit. Son cinéma, très orienté vers le vrai dans son sens le plus pur, ne m'a pas toujours séduit mais j'ai toujours reconnu chez lui une maîtrise formelle. Parfois ça me transporte complètement (Hadewijch, son meilleur film à mes yeux), d'autres fois beaucoup moins (Hors Satan ou Twentynine Palms).
Il est intéressant de constater à quel point le cinéma de Dumont ne cesse d'évoluer : après avoir dirigé pour la première fois un acteur professionnel (en l'occurrence Juliette Binoche dans Camille Claudel 1915) et s'être tourné vers la comédie (lui plutôt habitué aux drames sociaux) avec le très bon téléfilm P'tit Quinquin, le cinéaste nordiste reste dans le même registre avec Ma Loute, sa première comédie dédiée au cinéma.
Il faut très peu de temps pour voir à qui on a à faire : ces paysages du Nord si magnifiquement filmés, ces personnages en décalage avec leur monde mais toujours magnifiés par le cinéaste. Nous avons ici un beau film, peut-être la plus belle comédie de l'année d'un point de vue purement formel.
Le film peut décontenancer car ce n'est pas une comédie comme les autres et son absurde pourra laisser sur le carreau. N'en déplaise aux détracteurs du cinéaste qui lui reprochent souvent d'avoir du mépris pour les habitants du Nord, ce sont eux qui sont le mieux dépeints ici, sans qu'ils ne soient blancs comme neige évidemment (ce serait mal connaître Bruno Dumont). Les dindons de la farce, ce sont clairement les nobles, incarnés entre autres par un Fabrice Luchini et une Juliette Binoche en contre-emploi total, qui exagèrent toutes leurs paroles et leurs gestes de manière complètement hilarante. Dans Ma Loute, c'est clairement la bourgeoisie qui est tournée en dérision.
Le choix de Dumont de choisir des acteurs professionnels pour jouer la noblesse et des amateurs pour jouer le "petit peuple" fait sens ici, il n'aurait en effet pas été facile pour n'importe qui de jouer les bouffonneries auxquelles on assiste (la séquence du repas de famille est un festival de n'importe quoi, dans le bon sens).
Ma Loute fait du bien, c'est une bouffée d'air dans la comédie française trop souvent réduite aux grosses productions avec Kev Adams, Franck Dubosc ou Dany Boon en tête d'affiche. S'il ne devait y avoir un seul reproche à lui adresser, ce serait sa durée (2h c'est un poil trop long) mais ce n'est clairement pas rédhibitoire. Je pense toutefois qu'il est quand même nécessaire de connaître un minimum le cinéma de Dumont pour pouvoir comprendre ses intention et ainsi entrer totalement dans le film. Il ne faut non plus pas être totalement allergique à son style bien évidemment...


Insaisissables 2 (2016) - Jon M. Chu


Insaisissables avait été une grosse déception à sa sortie. Ne connaissant presque rien du film, j'étais allé le regarder pour voir des tours de magie (moi qui aime ça) et m'étais au final retrouvé devant un déluge de tours en CGI tous plus capillotractés les uns que les autres.
Le film avait cependant bien fonctionné au box-office, et comme tout film qui rencontre un gros succès ces temps, une suite a vite été annoncée. Autant dire que cette fois-ci je n'en attendais rien, j'espérais éventuellement qu'il soit mieux que le premier mais il n'en est rien, pire, il réussit à être encore pire, la faute à une surenchère permanente.
Insaisissables 2, ce sont tous les défauts du premier qui resurgissent : des "tours" totalement impossibles, des explications sans queue ni tête, des ficelles de scénario grosses comme le bras et cette sensation permanente qu'on me prend vraiment pour un débile. Non parce qu'il faut voir la gueule des "twists" du film, principalement celui de fin (alors déjà faudra m'expliquer comment les Cavaliers ont pu revenir à Londres depuis la Chine alors qu'ils sont recherchés par le FBI) où, par un concours de circonstances tout ce qu'il y a de plus improbable, nos 4 compères réussissent à la perfection leur final car les méchants sont assez intelligents pour aller exactement là où les magiciens voulaient qu'ils aillent. D'ailleurs parlons-en des "méchants" (parce qu'on ne sait jamais trop, parfois ils sont méchants, ensuite amis) : Daniel Radcliffe débarque dans ce gros bordel et constitue l'antagoniste principal alors qu'il n'est pas crédible pour un sou, sans parler de ce pauvre Michael Caine qui n'en finit plus d'enchaîner les rôles à des années-lumières de son véritable talent (tout comme Freeman d'ailleurs). Au final, encore un film où je suis arrivé à la fin énervé de voir qu'on se fout de ma gueule à ce point là (je ne parlerai pas de la fille et de l'histoire d'amour qui sort d'on ne sait où, c'est au-dessus de mes forces).
Insaisissables 2 est finalement à l'image de la majorité des blockbusters de cet été (et de l'année de manière plus générale) : fade et sans idées, se retrouvant obligé d'user d'artifices débiles pour nous faire croire que ça marche, mais personne n'est dupe (en tout cas pas moi). A éviter donc, le vrai tour de magie ce serait que le film se soit planté au box-office et qu'une suite ne voit jamais le jour...


Les Sept Samouraïs (1954) - Akira Kurosawa


En pleine découverte de la filmographie de Kurosawa, il fallait bien que je commence par quelque part et mon choix s'est tourné vers ce qui est considéré comme son plus grand film, celui qui l'a fait connaître en occident, je veux bien sûr parler de Les Sept Samouraïs !
Sa durée (à peine moins de 3h30) pourrait en rebuter quelqu'un mais ce serait mal connaître le génie de Akira Kurosawa pour raconter des histoires, en l'occurrence celle de 7 samouraïs qui ont pour mission de protéger un village de paysans d'une attaque imminente de bandits.
Jamais je n'ai senti le temps passer durant le film, il y a une exposition qui nous présente simplement les tenants et aboutissants mais, surtout, cette galerie de personnages tous plus attachants les uns que les autres (dont un Toshiro Mifune en clown de service juste savoureux !), même ceux qui sont plus secondaires. Digne héritier des chanbara traditionnels japonais (revisité à la sauce Kurosawa), Les Sept Samouraïs est un chef-d'oeuvre total et un monument de mise en scène ! Jamais je n'avais vu quelqu'un maîtriser à ce point le 1.37, la composition de cadre est constamment retravaillée au point de nous donner des plans juste hallucinants de beauté sans jamais surcharger l'image.
Puis il y a ce dynamisme, il se passe toujours quelque chose à l'écran et le choix de Kurosawa de filmer l'action en longue focale n'est pas anodin, tout comme l'utilisation de ralentis qui étaient déjà précurseur - allez savoir - du cinéma d'un certain Sam Peckinpah.
L'humanisme qui se dégage de la fresque du maître Kurosawa (présentant à la fois les samouraïs et les paysans avec leurs bons côtés et leurs défauts) couplé à cette perfection formelle font de Les Sept Samouraïs un film total, un chef-d'oeuvre ultime pour l'éternité.


Il était une fois dans l'Ouest (1968) - Sergio Leone


Après avoir connu la gloire internationale avec sa Trilogie du Dollar (principalement grâce au carton énorme de Le Bon, la Brute et le Truand), Sergio Leone n'a pas mis longtemps à se pencher sur son nouveau projet, Il était une fois dans l'Ouest, première pierre de se qui constituera au final une nouvelle trilogie centrée cette fois-ci sur plusieurs périodes clés de l'histoire américaine.
Cette fois-ci, exit Clint Eastwood et autres Lee Van Cleef qui sont remplacés (dans des rôles assez similaires) par Charles Bronson et Henry Fonda.
Je ne pouvais passer à côté de l'occasion de redécouvrir ce qui est considéré comme la quintessence du western spaghetti sur grand écran, je me suis donc rendu à la Cinémathèque excité comme une puce et en suis ressorti émerveillé.
Dès la superbe séquence d'introduction, Sergio Leone nous rappelle à quel point il est un réalisateur hors-paire. Tout le reste du film sera du même acabit, tout est réglé au millimètre : les travellings, le cadrage (notamment ces fameux très gros plans centrés sur les yeux et si chers à Leone), cette photographie dorée à en tomber d'émerveillement.
Le réalisateur italien a également un don pour iconiser instantanément ses personnages. A l'instar de l'homme sans nom dans la Trilogie du dollar, l'homme à l'harmonica est présenté en un seul long plan et il nous sera expliqué que tout à la fin qui il est vraiment à l'aide - à nouveau - d'une unique séquence et d'une seule ligne de dialogue. C'est clair, concis mais diablement efficace, beaucoup de scénaristes actuels pourraient d'ailleurs s'en inspirer au lieu de se perdre dans des développements interminables.
Puis il y a ce duel final entre ces deux gueules légendaires du cinéma hollywoodien classique (des gueules telles qu'on en voit plus d'ailleurs) que sont Fonda et Bronson, rythmé par ce qui est certainement une des meilleures compositions de l'éternel Ennio Morricone...Un de mes plus grands moments de cinéma assurément ! Que l'on aime ou non, il serait impensable de ne pas considérer Il était une fois dans l'Ouest comme un des westerns majeurs de l'histoire, qui se démarque (comme le faisait déjà la Trilogie du dollar) par son ambiance très baroque, profondément dramatique mais avec ces quelques pointes d'humour que Leone sait si bien doser.


Café Society (2016) - Woody Allen


Woody Allen me plaît ces derniers temps ! Après son magnifique Magic in the Moonlight (véritable coup de cœur il y a deux ans) et son très bon - bien que moins marquant - L'homme Irrationnel, le réalisateur new-yorkais continue son rythme de 1 film/an et nous emmène cette fois-ci dans les Etats-Unis des années 1930 où un jeune homme, Bobby (Jesse Eisenberg) quitte New-York pour essayer d'aller percer à Hollywood.
Comme à son habitude, Woody Allen injecte de sa propre personne dans ses personnages, dont Bobby, jeune homme juif originaire de New-York. Je dois dire que même si le talent de Allen pour filmer ses actrices est intact (je ne trouve pas Kristen Stewart particulièrement jolie en temps normal mais il parvient à la rendre mignonne), Emma Stone manque un peu car il s'agit à mes yeux de la plus belle muse qu'ait jamais filmé Woody Allen et il est donc difficile de passer après.

Mis à part ce détail complètement subjectif, autant dire que le charme opère : le Hollywood des années '30 est magnifiquement reconstruit et, comme c'est souvent le cas chez le metteur en scène, la photographie est chatoyante et de toute beauté. L'alchimie entre Eisenberg et Stewart fonctionne vraiment bien et leur romance est vraiment crédible bien qu'assez classique. C'est d'ailleurs le seul petit défaut que je pourrais vraiment lui trouver c'est que le film est un peu en-dessous au niveau de l'écriture, c'est assez classique et je ne me sens pas forcément très concerné. La fin est par contre très belle, Allen arrive à éviter certains pièges dans lesquels il aurait pu tomber (en ce qui concerne la relation amoureuse sans en dire plus).
C'est donc à nouveau une bonne cuvée Allen qui, mine de rien, de bonifie vraiment avec le temps. Alors c'est certes inférieur à Magic in The Moonlight mais ça tient la distance par rapport à L'homme Irrationnel (je cite ces deux-là parce que c'est ceux dont je me rappelle le mieux). Un bon moment à passer, en plus ça ne dure qu'1h40 !


La Tortue rouge (2016) - Michael Dudok de Wit


Wow...parfois, les mots ne suffisent pas pour décrire ce que vous ressentez après le visionnage d'un film, La Tortue Rouge en fait partie mais je vais tout de même essayer d'écrire quelques mots.
Je suis un grand fan des courts-métrages de Michael Dudok de Wit, notamment son formidable Le Moine et le Poisson que je considère à titre personnel comme un petit chef-d'oeuvre d'animation.
Pourtant, le néerlandais ne s'était encore jamais essayé au format long, il a donc passé près d'une décennie, avec l'aide des studios Ghibli, à préparer La Tortue Rouge qui est sorti dans nos salles cet été et que j'ai eu le malheur de rater au cinéma.
Oh oui, quel malheur quand je vois le résultat, peut-être un des plus beaux films d'animation qu'il m'ait été donné de voir. L'histoire est simple et elle commence in media res avec cet homme échoué sur une île déserte sans vraiment d'autre explication. Alors qu'il essaye de nombreuses fois, sans succès, de quitter l'île, tel une Sisyphe transportant inlassablement sa pierre, ce homme va se résigner et se voir contraint à passer le reste de sa vie sur cette île.
Sans dialogues et d'une beauté à en tomber (avec un chara-design qui rappelle beaucoup les dessins de Hergé), le film est une ode à la poésie (on ressent la touche Ghibli), un récit universel sur la naissance, l'amour et la mort tandis qu'on passe de la tristesse à la colère en passant par une angoisse profonde (la séquence dans l'espère de grotte) et un bonheur éphémère.
Les dessins sont épurés, beaucoup d'émotion passe par la mise en scène et la magnifique musique parfaitement utilisée sans qu'elle ne soit trop envahissante. L'absence de dialogue (les rares fois où les personnages s'expriment c'est avec des cris) est formidable car il n'y en a pas besoin, tout passe par l'image, ce qui en fait une magnifique oeuvre visuelle, un pur film de cinéma.

La Tortue Rouge, ce n'est pas un film de survie mais plutôt un film sur l'homme face à la nature avec cet aspect fantastique lié à la fameuse tortue, justement, et à ce qu'elle advient (ce que je ne révélerai pas ici). Les très nombreux plans larges donnent une idée de l'échelle et nous rappelle à quel point nous sommes petits, à l'image des grains de sable de la plage sur laquelle va s'échouer tant de fois ce pauvre homme.
Au moment où j'écris ces lignes, quelques heures après le visionnage, j'en ai encore la gorge serrée, bouleversé par ce que je viens de voir, signe que le cinéma d'animation, quand il est entre les mains de tels artistes, a encore de magnifiques jours devant lui.

mercredi 7 décembre 2016

Sully (2016)

Titre : Sully

Date de sortie française : 30 novembre 2016

Réalisateur : Clint Eastwood

Scénario : Todd Komarnicki d'après le roman "Highest Duty" écrit par Chesley Sullenberger et Jeffrey Zaslow

Directeur de la photographie : Tom Stern

Montage : Blu Murray

Musique : Christian Jacob et Tierney Sutton Band

Durée : 1h36

Avec : Tom Hanks, Aaron Eckhart, Valerie Mahaffey, Mike O'Malley, Jamey Sheridan, Anna Gunn, Laura Linney

Synopsis Le 15 janvier 2009, le monde a assisté au "miracle sur l'Hudson" accompli par le commandant "Sully" Sullenberger: en effet, celui-ci a réussi à poser son appareil sur les eaux glacées du fleuve Hudson, sauvant ainsi la vie des 155 passagers à bord. Cependant, alors que Sully était salué par l'opinion publique et les médias pour son exploit inédit dans l'histoire de l'aviation, une enquête a été ouverte, menaçant de détruire sa réputation et sa carrière. (Source : Premiere.fr)


Mon avis


La longévité de Clint Eastwood impose le respect. A 86 ans, le réalisateur californien tourne à un rythme d'un film par année, se rendant certainement compte que chacun de ceux-ci pourrait être son dernier (bien qu'on lui souhaite de continuer le plus longtemps possible bien entendu). Un an après le carton de American Sniper, son plus gros succès au box-office, Eastwood continue son exploration de la figure du héros américain qui l'a toujours passionné.

Sully revient sur un événement survenu le 15 janvier 2016 quand, après avoir perdu ses deux réacteurs, le commandant Chesley Sullenberger (incarné ici par un impeccable Tom Hanks) décide de faire atterrir son Airbus A320 sur l'Hudson, permettant ainsi de sauver la vie des 155 passagers à bord de l'avion.

Le film est bon, très bon même en tant que tel mais il le devient encore plus si on le compare avec la réalisation précédente de Eastwood où il racontait l'histoire d'un autre type de héros américain, Chris Kyle, complètement à l'opposé du capitaine Sully par beaucoup d'aspects.
L'un a sauvé 150 vies, l'autre en a ôté tout autant, le premier est proche de la retraite après plus de 40 années de services, le second est dans son "prime", bien qu'il sait que sa carrière sera plus éphémère.
L'un comme l'autre sont des citoyens américains mais tandis que l'un tue à l'étranger les menaces contre sa patrie, Sully sauve la vie de nombreux de ses propres compatriotes.


Il est intéressant de voir la manière dont Eastwood traite ces différents types de héros et la société (américaine en l'occurrence) qui les entoure. Car cette dernière joue un rôle important, Sully a beau avoir sauvé de nombreuses vies, une enquête est ouverte contre lui car des simulations par ordinateur ont démontré qu'il aurait eu le temps de faire demi-tour pour se poser à un des aéroports proches. Il se retrouve donc face à des bureaucrates qui ne réfléchissent qu'en chiffres et simulations, en oubliant totalement le côté humain (ce que Sully leur rappellera sur la fin après avoir visionné les simulations effectuées par des pilotes).

Le personnage de Sully en lui-même a un excellent capital sympathie, c'est un homme humble et très calme qui répond aux remerciements des personnes qu'il a sauvé par un simple "je n'ai fait que mon travail". Parce que c'est aussi ça le héros américain chez Clint Eastwood, c'est quelqu'un qui excelle dans son travail (autant Chris Kyle que Chesley Sullenberger), quel qu'il soit et autant amoral qu'il puisse paraître.

Le calme de Sully est particulièrement extraordinaire lors de la séquence de l'amerrissage justement. Là où de nombreuses personnes auraient perdu leurs moyens, le commandant prend les décisions qui vont leur sauver la vie en l'espace des quelques 200 secondes seulement. Toute la fameuse séquence (qui est d'ailleurs étalée pendant tout le film par bribes) est un grand moment de mise en scène, alors même que Eastwood fait dans l'anti-spectaculaire en privilégiant les plans éloignés et en les faisant durer.


Comme mentionné plus haut, le film ne tombe pas dans la facilité de nous présenter d'entrée la séquence de l'accident (comme le faisait Zemeckis avec Flight par exemple, que j'ai d'ailleurs apprécié), celle-ci sera présentée plusieurs fois en y ajoutant toujours un élément en plus tout au long des 1h30. D'ailleurs, le seul défaut qui pourrait vraiment être reproché au film c'est de s'étirer en longueur sur la fin avec les multiples simulations qui se ressemblent toutes. Il faut dire que le matériau à disposition n'était pas si conséquent car c'est une affaire qui s'est au final vite réglée mais le film n'aurait pas été bien différent avec 5 minutes de moins.

Mis à part cet aspect dû en grande partie à la nature de l'histoire d'origine, la dernière partie du film avec l'audience est très réussie. Sully est certain que ses choix étaient les bons et va le prouver en gardant le calme qui l'habite en permanence. La confrontation est vraiment intéressante, particulièrement quand le commandant rappelle aux bureaucrates qui lui font face que le facteur humain n'a jamais été pris en compte lors des simulations (même avec des pilotes expérimentés). Car au final, un héros est avant tout un être humain qui n'est de loin pas infaillible mais qui est sûr de ses convictions.

Sully est un bon très bon cru de Clint Eastwood. Le cinéaste continue son exploration du héros américain tout en présentant une autre facette de celui-ci, plus médiatique et spectaculaire qu'un Chris Kyle mais également plus "éthique", héros du peuple avant d'être un héros de la nation.
Je ne peux que vous encourager à aller le voir car il est peu probable que Eastwood nous sorte encore des films pendant 10 ans.