La principale différence avec le montage d'origine est l'inclusion de deux séquences inédites : l'une présente un dialogue pas forcément intéressant entre
). Par contre, toute la séquence inédite du sauvetage de Malicia permet à Singer de se faire vraiment plaisir en proposant un montage alterné entre Magnéto vieux (
) qui s'infiltre dans le manoir avant d'échapper aux Sentinelles et son homologue jeune (
) qui s'en va récupérer son casque.
La séquence avec Fassbender était déjà présente dans la version cinéma mais le nouveau montage fait gagner toute la scène en rythme, en plus de la réalisation toujours maîtrisée de
.
. La vision d'auteur que Singer injecte dans ses films fait vraiment du bien au milieu de la masse informe de blockbusters super-héroïques qu'on nous balance à la figure actuellement. Des séquences comme celle des portails ou de
j'en redemande, et je veux que ce soit un type comme Bryan Singer, qui sait filmer l'action sans jamais tomber dans l'exagération, qui me l'apporte.
Ayant de grosses lacunes dans la filmographie du cinéaste, je me suis lancé plein d'enthousiasme dans son premier film, Pusher, premier volet d'une trilogie extrêmement appréciée des cinéphiles.
Et il faut dire que c'est une petite claque ! Filmé intégralement en caméra à l'épaule, Refn nous emmène au cœur du quotidien d'un trafiquant de stupéfiants à Copenhague. Étalé sur une durée de une semaine, le film est magnifiquement bien rythmé et embelli par la réalisation de Refn et ses très longs plans, on a peut-être là le meilleur long-métrage jamais tourné en caméra-épaule, rien que ça ! Comme je l'ai dit, on y voit déjà apparaître certains éléments visuels qui deviendront si chers au cinéaste par la suite, particulièrement cette attirance pour les néons et les lumières très vives (beaucoup de scènes se passent dans des bars ou des boites de nuit illuminées de toutes parts) qui contrastent avec la grisaille extérieure de la capitale danoise.
Il y a aussi ce casting de "gueules" : Mads Mikkelsen bien entendu mais surtout Kim Bodnia qu'on ne lâchera pratiquement pas d'une semelle durant ses péripéties. Un gros tour de force pour un premier film !
Pusher 2 : Du sang sur les mains (2004) - Nicolas Winding Refn
Si je parle d'essai transformé, c'est que le film réussi la prouesse d'être au niveau du premier alors que NWR lui-même avait peur de ternir le succès de son premier film. L'histoire est à nouveau racontée du point de vue du personnage principal avec cette incroyable caméra à l'épaule hyper dynamique qui permet, comme dans Pusher premier du nom, de maintenir un rythme effréné tout du long. C'est simple, jamais on ne s'ennuie, il se passe toujours quelque chose alors que l'on suit Tonny dans cette Copenhague froide, toujours représentée de manière très peu accueillante par Refn.
Comme les deux premiers Pusher, l'histoire tourne autour du trafic de stupéfiants à Copenhague avec une réalisation toujours aussi maîtrisé caméra-épaule de Refn (ce sera d'ailleurs son dernier film à être tourné de façon aussi nerveuse).
Le film est clairement le moins bon des 3, principalement parce que le personnage principal souffre un peu de la comparaison avec Kim Bodnia et, surtout, Mads Mikkelsen. Alors certes il a de la présence en raison de sa carrure, mais il en imposait clairement plus quand il était un personnage secondaire, surtout dans le premier. Après ça reste très bon, Refn a le mérite d'avoir fait 3 films très semblables formellement parlant mais avec à chaque fois un autre personnage au centre de son histoire (là où, de nos jours, les trilogies suivent généralement le parcours d'un unique protagoniste principal).
Si l'attirance de Refn pour les personnages déviants n'est pas sans rappeler un certain
Martin Scorsese, la froideur avec laquelle celui-ci filme
Copenhague lorgne plutôt du côté de chez
Kubrick (qui sera d'ailleurs son influence principale pour
Bronson). Avec sa trilogie, le cinéaste danois s'est pourtant forgé son propre style, qu'il tournera de plus en plus vers l'ultra-esthétisme par la suite.
Midnight Special (2016) - Jeff Nichols
Alors que je l'attendais avec une grande impatience, Midnight Special n'a jamais daigné montrer le bout de son nez dans les salles romandes. Ayant enfin eu l'occasion de le voir, je peux enfin donner mon avis sur la première plongée de Jeff Nichols dans la science-fiction.
Si j'ai moins apprécié dans l'ensemble que
Take Shelter qui est pour l'instant mon
Nichols préféré, le réalisateur nous livre ici un très bon film de science-fiction, très
spielbergien et avec toujours ce petit soupçon de
Malick que le réalisateur
arkansasais aime tant. Comme souvent chez Nichols, le film nous plonge directement dans le feu de l'action : on ne sait pas vraiment où on est, qui est ce jeune garçon, on sait juste que lui et son père biologique sont poursuivis par la police pour enlèvement.
Là où bon nombre de gros films de science-fiction actuels tentent par tous les moyens de nous en mettre plein la vue, Midnight Special a le mérite de ne pas trop en montrer jusqu'à la toute fin. On ne sait pas vraiment d'où proviennent les pouvoirs du gamin et quelle est véritablement sa missions.
Mais surtout, c'est beau, c'est très beau même, comme on en a pris l'habitude avec Jeff Nichols. Certains plans aériens notamment m'ont vraiment soufflé, tout comme la partie finale, très impressionnante mais que j'ai également trouvé très poétique.
Je retiens aussi une excellente bande-son qui accompagne très bien la tension (car il y en a, encore une chose que le réalisateur maîtrise bien).
Je reprocherais au film au défaut en particulier, c'est un problème de rythme vers le début du film, les premières scènes avec Adam Driver notamment (alors qu'il est très bon, là n'est pas le souci) qui ne font pas vraiment avancer l'histoire.
Midnight Special est de nouveau une réussite pour Jeff Nichols qui nous livre un film de science-fiction se recentrant sur l'essentiel : la cellule familiale et l'amour d'un père pour son enfant...De quoi attendre avec une certaine impatience
Loving, le prochain film du réalisateur qui a d'ailleurs déjà été présenté à Cannes cette année.
Zootopie (2016) - Byron Howard, Rich Moore & Jared Bush
Gros carton de ce début d'année,
Zootopie était intéressant sur le papier car il marquait le retour de Disney à un genre qui a donné naissance à de très grands films : l'anthropomorphisme.
La seule bande-annonce (qui était plutôt un extrait) que j'avais vu, avec le paresseux m'avait bien fait sourire et j'étais donc curieux de voir le résultat final.
Finalement, le film est un peu à l'image de ce que fait Disney depuis quelques années : c'est beau, c'est plutôt sympa mais ça reste très classique !
On suit en effet le parcours le
Judy, premier lapin à intégrer le service de police de la ville de Zootopie où ne vivent que des animaux. Elle va devoir prouver sa valeur et va vite se retrouver confronter à une histoire d'enlèvement et d'animaux qui deviennent enragés (les prédateurs), elle va donc s'attacher les services de
Nick, un renard spécialisé dans les arnaques (et dont le design m'a beaucoup fait penser à
Fantastic Mr. Fox) pour résoudre cette affaire.
Et le problème, c'est justement que le métrage suive un schéma totalement classique d'enquête policière où au final, des personnages présentés comme gentils vont finalement s'avérer être de grands méchants.
Surtout que, arrivé à la fin du film, pas grand chose n'a changé, tout le monde se retrouve pour danser sur du Shakira mais il n'y a pas de réelle remise en question (principalement concernant le travail de la police ou de cette "utopie" qui n'en est pas vraiment une).
A la fin je me suis donc retrouvé à me dire "meh", c'est certes très solide techniquement et la direction artistique a un charme certain, mais je n'ai pas eu l'impression d'avoir vraiment quelque chose de neuf devant les yeux et c'est vraiment dommage.
Une histoire vraie (1999) - David Lynch
Finissant petit à petit la filmographie de
David Lynch, il me restait un film que je n'avais pas encore vu de lui, celui relatant l'histoire vraie (comme le titre pouvait potentiellement mettre la puce à l'oreille) d'un vieillard de 73 ans qui va parcourir plus de 550km au volant d'une tondeuse à gazon pour aller rendre visite à son frère qui a été victime d'un infarctus.
Je n'en attendais pas grand chose pour tout dire, je savais que c'était un film passablement éloigné du style très torturé du cinéaste et beaucoup plus accessible qu'un
Lost Highway ou un
Mulholland Drive pour ne citer qu'eux.
Eh bien quel coup de coeur ça a été !
Lynch nous livre ici un magnifique road-trip, assez extravagant vu le moyen de locomotion utilisé par
Alvin Straight mais d'une beauté sans pareil.
Je ne m'étais jamais attaché autant rapidement à un personnage, il faut dire que
Richard Farnsworth livre une prestation incroyable de justesse en faisant passer énormément d'émotion par son regard. Plusieurs fois j'ai eu la larme à l'oeil en voyant Alvin croiser sur sa route différentes personnes à qui il raconte sa vie, ses bonheurs mais également ses malheurs, sans que jamais il ne soit jugé de telle ou telle manière. Le tout est agrémenté de la magnifique musique de
Angelo Badalamenti qui souligne à merveille l'ambiance très mélancolique qui se dégage de cette virée parmi ces paysages si sublimement mis en avant par
David Lynch.
Une histoire vraie est un film très simple dans sa forme mais avec un gros travail de fond derrière. Si jusqu'alors,
Blue Velvet avait ma préférence dans la filmographie de Lynch, celui-ci vient de se faire chiper sa place par ce pur morceau de cinéma, ce pur morceau de beauté. Un chef-d'oeuvre !
Holy Motors (2012) - Leos Carax
Difficile de parler d'un tel film, tant son étrangeté risque d'en laisser pas mal sur le carreau. Ne connaissant pas Leos Carax, mais étant familier avec la très bonne réputation du film, je me suis donc lancé avec curiosité et j'ai vraiment aimé, sans être une claque non plus.
Pendant tout le film, nous suivons une journée de M. Oscar (Denis Lavant), un homme dont le métier est de changer constamment d'apparence, de se mettre dans la peau de différents personnages afin d'aller à plusieurs rendez-vous. Tout le film, ou presque, se construit donc sur le schéma M. Oscar monte dans la limousine - il est informé de son prochain rendez-vous - il se prépare, se déguise - va au rendez-vous - remonte dans la limousine - etc. Ce qui est très fort, c'est la performance de Denis Lavant qui arrive à nous faire croire à tous les personnages qu'il incarne, que ce soit un père de famille, un tuer professionnel, Merde (un personnage tiré du court-métrage du même nom de Carax), même un vieux sur son lit de mort qui est saisissant de réalisme alors qu'on sait qui est la personne se cachant sous le maquillage. Lavant effectue en fait le travail que fait un acteur traditionnel sur plusieurs films mais le concentre en un seul métrage mais garde quand même une certaine distance avec ses personnages (si ceux-ci meurent, M. Oscar reste en vie, la séquence du tueur est d'ailleurs assez représentative de cet aspect).
Alors certes, toutes les saynètes ne se valent pas - j'ai adoré la séquence des égouts et l'entracte aux accordéons (juste génialissime !) mais j'ai par contre moins aimé la séquence avec Kylie Minogue ou celle du vieil homme que je trouve vraiment trop longues pour ce qu'elles racontent.
Une chose est sûre, c'est que Leos Carax sait mettre en scène son histoire (la scène du studio d'animation est assez folle visuellement) que je ne me risquerai pas à essayer d'interpréter, si tant est qu'il existe une interprétation. Un film que je conseille pour son concept et le formidable Denis Lavant.
Warcraft : Le Commencement (2016) - Duncan Jones
Incroyable...j'en reste sans voix. Il y a de ces films dont vous n'attendez absolument rien, éventuellement qu'ils soient un poil divertissant et dont vous ressortez quand même déçu. Disons-le tout de suite, Warcraft : Le Commencement en fait partie, tant nous tenons là une des pires merdes de l'année.
C'est effarant. On te balance dans l'histoire sans aucun développement des personnages, on ne sait pas où on est, qui sont ces gens, moi qui n'ai jamais joué à Warcraft je n'ai absolument rien pigé à quels étaient les enjeux de ce gros bordel. Là on est face à un film sans doute prévu pour faire plaisir aux fans mais j'ai horreur de ça ! Un film, même tiré d'un autre média, devrait pouvoir réussir à contenter tout le monde, pas cracher à la gueule de ceux qui débarquent.
Pis mon dieu qu'est-ce que c'est moche, entre les orcs tous plus ignobles les uns que les autres, des CGI parfois à la ramasse, rien n'est vrai, ce ne sont que des personnages vides qui s'excitent devant des fonds verts dégueulasses.
Pis ce n'est pas l'immense profondeur des personnages (et du casting surtout) qui va sauver ça quand on voit la gueule du roi et de la reine qui n'ont l'air d'avoir aucune idée de ce qu'ils foutent là, la femme mi-orc, mi-humaine (appelons-là humorc, j'ai oublié son nom de toute manière) qui après quelques heures s'attache au personnage principal et réciproquement.
Et le gros méchant orc alors, qu'est-ce qu'il branle pendant la grosse bataille finale (qui d'ailleurs se fait complètement sodomiser par n'importe quel affrontement du Seigneur des Anneaux) ? Tout le monde se tape dessus mais lui on ne le voit jamais sauf quand il faut venir gueuler sur ses soldats, il est quand même censé être surpuissant le mec...On a même droit au roi qui prend le temps, alors que toute son armée se fait égorger autour de lui, de débiter les banalités habituelles à l'humorc sur comment elle doit prendre le relai, qu'il se sacrifie, blablabla...
Mes yeux et mon corps entier n'étaient pas prêts pour ça, je n'ai pas de mots...et le pire c'est qu'il y aura sûrement une suite vu le sous-titre français du film. Duncan Jones aurait vraiment dû rester éloigné de ces conneries.
Croix de fer (1977) - Sam Peckinpah
Je ne suis pas un fin connaisseur du cinéma de Sam Peckinpah, le seul souvenir que j'ai d'un de ses films concerne Les Chiens de paille mais c'est vraiment lointain.
Je me suis donc attaqué à un de ses derniers films, considéré comme le plus abouti de sa riche carrière : Croix de fer.
Premier fait original à constater, le film se positionne du côté Allemand, peu après la Bataille de Stalingrad, sur le front russe. On y suit l'unité du Sergent Rolf Steiner (campé par le formidable James Coburn), chef désabusé, cynique, opposé à l'idéologie nazie et qui estime n'avoir de comptes à rendre à personne si ce ne sont ses hommes qu'il apprécie comme sa propre famille.
Ce qui est génial, c'est qu'on s'attache vite à Steiner et à ses hommes, on veut qu'ils survivent alors que les soldats de l'armée allemande sont plutôt dépeints comme les méchants de l'histoire dans bon nombre de films traitant de la Seconde Guerre mondiale. Peckinpah n'en fait pas pour autant un film manichéen, des salauds il y en a des deux côtés (dont notamment l'officier allemand qui convoite la croix de fer plus que tout)
Le film met toutefois une baffe visuelle assez folle, tant le réalisateur californien est un patron de la mise en scène. Croix de Fer est certainement le film de guerre le plus réaliste qu'il soit, que ce soit dans sa façon de reconstituer l'armement (Peckinpah a notamment réussi à utiliser les vrais tank soviétiques utilisés durant la guerre) ou dans sa manière de filmer les combats. Son utilisation des ralentis est toujours autant pertinente afin d'appuyer encore plus la violence des affrontements (car le film est très violent), il n'hésite pas non plus à suivre les soldats caméra à l'épaule dans un style quasi-documentaire pour nous emmener au coeur de l'action.
Croix de Fer est un film de guerre majeur et demeure, même 40 ans après, d'une modernité assez incroyable. Le film n'a pas pris une ride et continue d'influencer certains réalisateurs qui s'essaient au genre (comme le récent
Fury de
David Ayer). Un chef-d'oeuvre que je ne peux que vous conseiller !
Swiss Army Man (2016) - Daniel Scheinert et Daniel Kwan
Au menu des étrangetés qui avaient attiré ma curiosité, Swiss Army Man figurait en tête de liste. Premier long métrage des Daniels (primés pour leur mise en scène au Festival Sundance) comme ils s'appellent eux-mêmes, le film relate l'histoire d'un homme, Hank (Paul Dano), échoué sur une minuscule île déserte et qui tente de se suicider. Il fait alors la connaissance d'un cadavre pétomane pas vraiment mort nommé Manny (Daniel Radcliffe) avec qui il va se lier d'amitié. Le macchabée va également révéler avoir certains pouvoirs qui vont aider Hank à survivre et retrouver la civilisation (d'où le titre du film qui fait références aux célèbres Swiss Army Knives ou couteaux suisses dans la langue de Molière).
Au vu de ce synopsis complètement hallucinant et de la bande-annonce, je m'attendais à un truc absurde à souhait, il s'avère que c'est au final une espèce de patchwork des différentes idées que l'on retrouve dans les courts-métrages réalisés par les Daniels.
Le film est certes drôle mais il est raconté d'un ton plutôt sérieux, comme si les cinéastes avaient tenté de livre une sorte de poésie absurde et décalée. Le problème c'est que ça ne marche pas tout le temps, surtout quand c'est accompagné de certaines réflexions pas franchement subtiles. Il n'empêche que les deux réalisateurs montrent un certain talent de mise en scène et que l'alchimie entre Dano et Radcliffe fonctionne vraiment bien. Il en résulte certains passages très drôles, certaines belles séquences mais également d'autres plus déconcertantes.
Si le concept est vraiment respecté du début à la fin, je ne peux m'empêcher de ressentir une certaine déception, je pense que j'aurais préféré un film sans queue ni tête où il n'y a aucun question à se poser sur ce que l'on voit à l'écran (comme le fait bien Quentin Dupieux par exemple). Le film reste quand même une expérience vraiment agréable que je conseille ne serait-ce que pour son concept assez génial.
Ma Loute (2016) - Bruno Dumont
Dans le paysage cinématographique français, Bruno Dumont est un cas particulier, une exception, une des pattes les plus reconnaissables qu'il soit. Son cinéma, très orienté vers le vrai dans son sens le plus pur, ne m'a pas toujours séduit mais j'ai toujours reconnu chez lui une maîtrise formelle. Parfois ça me transporte complètement (Hadewijch, son meilleur film à mes yeux), d'autres fois beaucoup moins (Hors Satan ou Twentynine Palms).
Il est intéressant de constater à quel point le cinéma de Dumont ne cesse d'évoluer : après avoir dirigé pour la première fois un acteur professionnel (en l'occurrence Juliette Binoche dans Camille Claudel 1915) et s'être tourné vers la comédie (lui plutôt habitué aux drames sociaux) avec le très bon téléfilm P'tit Quinquin, le cinéaste nordiste reste dans le même registre avec Ma Loute, sa première comédie dédiée au cinéma.
Il faut très peu de temps pour voir à qui on a à faire : ces paysages du Nord si magnifiquement filmés, ces personnages en décalage avec leur monde mais toujours magnifiés par le cinéaste. Nous avons ici un beau film, peut-être la plus belle comédie de l'année d'un point de vue purement formel.
Le film peut décontenancer car ce n'est pas une comédie comme les autres et son absurde pourra laisser sur le carreau. N'en déplaise aux détracteurs du cinéaste qui lui reprochent souvent d'avoir du mépris pour les habitants du Nord, ce sont eux qui sont le mieux dépeints ici, sans qu'ils ne soient blancs comme neige évidemment (ce serait mal connaître Bruno Dumont). Les dindons de la farce, ce sont clairement les nobles, incarnés entre autres par un Fabrice Luchini et une Juliette Binoche en contre-emploi total, qui exagèrent toutes leurs paroles et leurs gestes de manière complètement hilarante. Dans Ma Loute, c'est clairement la bourgeoisie qui est tournée en dérision.
Le choix de Dumont de choisir des acteurs professionnels pour jouer la noblesse et des amateurs pour jouer le "petit peuple" fait sens ici, il n'aurait en effet pas été facile pour n'importe qui de jouer les bouffonneries auxquelles on assiste (la séquence du repas de famille est un festival de n'importe quoi, dans le bon sens).
Ma Loute fait du bien, c'est une bouffée d'air dans la comédie française trop souvent réduite aux grosses productions avec Kev Adams, Franck Dubosc ou Dany Boon en tête d'affiche. S'il ne devait y avoir un seul reproche à lui adresser, ce serait sa durée (2h c'est un poil trop long) mais ce n'est clairement pas rédhibitoire. Je pense toutefois qu'il est quand même nécessaire de connaître un minimum le cinéma de Dumont pour pouvoir comprendre ses intention et ainsi entrer totalement dans le film. Il ne faut non plus pas être totalement allergique à son style bien évidemment...
Insaisissables 2 (2016) - Jon M. Chu
Insaisissables avait été une grosse déception à sa sortie. Ne connaissant presque rien du film, j'étais allé le regarder pour voir des tours de magie (moi qui aime ça) et m'étais au final retrouvé devant un déluge de tours en CGI tous plus capillotractés les uns que les autres.
Le film avait cependant bien fonctionné au box-office, et comme tout film qui rencontre un gros succès ces temps, une suite a vite été annoncée. Autant dire que cette fois-ci je n'en attendais rien, j'espérais éventuellement qu'il soit mieux que le premier mais il n'en est rien, pire, il réussit à être encore pire, la faute à une surenchère permanente.
Insaisissables 2, ce sont tous les défauts du premier qui resurgissent : des "tours" totalement impossibles, des explications sans queue ni tête, des ficelles de scénario grosses comme le bras et cette sensation permanente qu'on me prend vraiment pour un débile. Non parce qu'il faut voir la gueule des "twists" du film, principalement celui de fin (alors déjà faudra m'expliquer comment les Cavaliers ont pu revenir à Londres depuis la Chine alors qu'ils sont recherchés par le FBI) où, par un concours de circonstances tout ce qu'il y a de plus improbable, nos 4 compères réussissent à la perfection leur final car les méchants sont assez intelligents pour aller exactement là où les magiciens voulaient qu'ils aillent. D'ailleurs parlons-en des "méchants" (parce qu'on ne sait jamais trop, parfois ils sont méchants, ensuite amis) : Daniel Radcliffe débarque dans ce gros bordel et constitue l'antagoniste principal alors qu'il n'est pas crédible pour un sou, sans parler de ce pauvre Michael Caine qui n'en finit plus d'enchaîner les rôles à des années-lumières de son véritable talent (tout comme Freeman d'ailleurs). Au final, encore un film où je suis arrivé à la fin énervé de voir qu'on se fout de ma gueule à ce point là (je ne parlerai pas de la fille et de l'histoire d'amour qui sort d'on ne sait où, c'est au-dessus de mes forces).
Insaisissables 2 est finalement à l'image de la majorité des blockbusters de cet été (et de l'année de manière plus générale) : fade et sans idées, se retrouvant obligé d'user d'artifices débiles pour nous faire croire que ça marche, mais personne n'est dupe (en tout cas pas moi). A éviter donc, le vrai tour de magie ce serait que le film se soit planté au box-office et qu'une suite ne voit jamais le jour...
Les Sept Samouraïs (1954) - Akira Kurosawa
En pleine découverte de la filmographie de Kurosawa, il fallait bien que je commence par quelque part et mon choix s'est tourné vers ce qui est considéré comme son plus grand film, celui qui l'a fait connaître en occident, je veux bien sûr parler de Les Sept Samouraïs !
Sa durée (à peine moins de 3h30) pourrait en rebuter quelqu'un mais ce serait mal connaître le génie de Akira Kurosawa pour raconter des histoires, en l'occurrence celle de 7 samouraïs qui ont pour mission de protéger un village de paysans d'une attaque imminente de bandits.
Jamais je n'ai senti le temps passer durant le film, il y a une exposition qui nous présente simplement les tenants et aboutissants mais, surtout, cette galerie de personnages tous plus attachants les uns que les autres (dont un Toshiro Mifune en clown de service juste savoureux !), même ceux qui sont plus secondaires. Digne héritier des chanbara traditionnels japonais (revisité à la sauce Kurosawa), Les Sept Samouraïs est un chef-d'oeuvre total et un monument de mise en scène ! Jamais je n'avais vu quelqu'un maîtriser à ce point le 1.37, la composition de cadre est constamment retravaillée au point de nous donner des plans juste hallucinants de beauté sans jamais surcharger l'image.
Puis il y a ce dynamisme, il se passe toujours quelque chose à l'écran et le choix de Kurosawa de filmer l'action en longue focale n'est pas anodin, tout comme l'utilisation de ralentis qui étaient déjà précurseur - allez savoir - du cinéma d'un certain Sam Peckinpah.
L'humanisme qui se dégage de la fresque du maître Kurosawa (présentant à la fois les samouraïs et les paysans avec leurs bons côtés et leurs défauts) couplé à cette perfection formelle font de Les Sept Samouraïs un film total, un chef-d'oeuvre ultime pour l'éternité.
Il était une fois dans l'Ouest (1968) - Sergio Leone
Après avoir connu la gloire internationale avec sa Trilogie du Dollar (principalement grâce au carton énorme de Le Bon, la Brute et le Truand), Sergio Leone n'a pas mis longtemps à se pencher sur son nouveau projet, Il était une fois dans l'Ouest, première pierre de se qui constituera au final une nouvelle trilogie centrée cette fois-ci sur plusieurs périodes clés de l'histoire américaine.
Cette fois-ci, exit Clint Eastwood et autres Lee Van Cleef qui sont remplacés (dans des rôles assez similaires) par Charles Bronson et Henry Fonda.
Je ne pouvais passer à côté de l'occasion de redécouvrir ce qui est considéré comme la quintessence du western spaghetti sur grand écran, je me suis donc rendu à la Cinémathèque excité comme une puce et en suis ressorti émerveillé.
Dès la superbe séquence d'introduction, Sergio Leone nous rappelle à quel point il est un réalisateur hors-paire. Tout le reste du film sera du même acabit, tout est réglé au millimètre : les travellings, le cadrage (notamment ces fameux très gros plans centrés sur les yeux et si chers à Leone), cette photographie dorée à en tomber d'émerveillement.
Le réalisateur italien a également un don pour iconiser instantanément ses personnages. A l'instar de l'homme sans nom dans la Trilogie du dollar, l'homme à l'harmonica est présenté en un seul long plan et il nous sera expliqué que tout à la fin qui il est vraiment à l'aide - à nouveau - d'une unique séquence et d'une seule ligne de dialogue. C'est clair, concis mais diablement efficace, beaucoup de scénaristes actuels pourraient d'ailleurs s'en inspirer au lieu de se perdre dans des développements interminables.
Puis il y a ce duel final entre ces deux gueules légendaires du cinéma hollywoodien classique (des gueules telles qu'on en voit plus d'ailleurs) que sont Fonda et Bronson, rythmé par ce qui est certainement une des meilleures compositions de l'éternel Ennio Morricone...Un de mes plus grands moments de cinéma assurément ! Que l'on aime ou non, il serait impensable de ne pas considérer Il était une fois dans l'Ouest comme un des westerns majeurs de l'histoire, qui se démarque (comme le faisait déjà la Trilogie du dollar) par son ambiance très baroque, profondément dramatique mais avec ces quelques pointes d'humour que Leone sait si bien doser.
Café Society (2016) - Woody Allen
Woody Allen me plaît ces derniers temps ! Après son magnifique
Magic in the Moonlight (véritable coup de cœur il y a deux ans) et son très bon - bien que moins marquant -
L'homme Irrationnel, le réalisateur new-yorkais continue son rythme de 1 film/an et nous emmène cette fois-ci dans les Etats-Unis des années 1930 où un jeune homme,
Bobby (
Jesse Eisenberg) quitte New-York pour essayer d'aller percer à Hollywood.
Comme à son habitude, Woody Allen injecte de sa propre personne dans ses personnages, dont Bobby, jeune homme juif originaire de New-York. Je dois dire que même si le talent de Allen pour filmer ses actrices est intact (je ne trouve pas Kristen Stewart particulièrement jolie en temps normal mais il parvient à la rendre mignonne), Emma Stone manque un peu car il s'agit à mes yeux de la plus belle muse qu'ait jamais filmé Woody Allen et il est donc difficile de passer après.
Mis à part ce détail complètement subjectif, autant dire que le charme opère : le Hollywood des années '30 est magnifiquement reconstruit et, comme c'est souvent le cas chez le metteur en scène, la photographie est chatoyante et de toute beauté. L'alchimie entre Eisenberg et Stewart fonctionne vraiment bien et leur romance est vraiment crédible bien qu'assez classique. C'est d'ailleurs le seul petit défaut que je pourrais vraiment lui trouver c'est que le film est un peu en-dessous au niveau de l'écriture, c'est assez classique et je ne me sens pas forcément très concerné. La fin est par contre très belle, Allen arrive à éviter certains pièges dans lesquels il aurait pu tomber (en ce qui concerne la relation amoureuse sans en dire plus).
C'est donc à nouveau une bonne cuvée Allen qui, mine de rien, de bonifie vraiment avec le temps. Alors c'est certes inférieur à Magic in The Moonlight mais ça tient la distance par rapport à L'homme Irrationnel (je cite ces deux-là parce que c'est ceux dont je me rappelle le mieux). Un bon moment à passer, en plus ça ne dure qu'1h40 !
La Tortue rouge (2016) - Michael Dudok de Wit
Wow...parfois, les mots ne suffisent pas pour décrire ce que vous ressentez après le visionnage d'un film, La Tortue Rouge en fait partie mais je vais tout de même essayer d'écrire quelques mots.
Je suis un grand fan des courts-métrages de
Michael Dudok de Wit, notamment son formidable
Le Moine et le Poisson que je considère à titre personnel comme un petit chef-d'oeuvre d'animation.
Pourtant, le néerlandais ne s'était encore jamais essayé au format long, il a donc passé près d'une décennie, avec l'aide des studios Ghibli, à préparer La Tortue Rouge qui est sorti dans nos salles cet été et que j'ai eu le malheur de rater au cinéma.
Oh oui, quel malheur quand je vois le résultat, peut-être un des plus beaux films d'animation qu'il m'ait été donné de voir. L'histoire est simple et elle commence in media res avec cet homme échoué sur une île déserte sans vraiment d'autre explication. Alors qu'il essaye de nombreuses fois, sans succès, de quitter l'île, tel une Sisyphe transportant inlassablement sa pierre, ce homme va se résigner et se voir contraint à passer le reste de sa vie sur cette île.
Sans dialogues et d'une beauté à en tomber (avec un chara-design qui rappelle beaucoup les dessins de Hergé), le film est une ode à la poésie (on ressent la touche Ghibli), un récit universel sur la naissance, l'amour et la mort tandis qu'on passe de la tristesse à la colère en passant par une angoisse profonde (la séquence dans l'espère de grotte) et un bonheur éphémère.
Les dessins sont épurés, beaucoup d'émotion passe par la mise en scène et la magnifique musique parfaitement utilisée sans qu'elle ne soit trop envahissante. L'absence de dialogue (les rares fois où les personnages s'expriment c'est avec des cris) est formidable car il n'y en a pas besoin, tout passe par l'image, ce qui en fait une magnifique oeuvre visuelle, un pur film de cinéma.
La Tortue Rouge, ce n'est pas un film de survie mais plutôt un film sur l'homme face à la nature avec cet aspect fantastique lié à la fameuse tortue, justement, et à ce qu'elle advient (ce que je ne révélerai pas ici). Les très nombreux plans larges donnent une idée de l'échelle et nous rappelle à quel point nous sommes petits, à l'image des grains de sable de la plage sur laquelle va s'échouer tant de fois ce pauvre homme.
Au moment où j'écris ces lignes, quelques heures après le visionnage, j'en ai encore la gorge serrée, bouleversé par ce que je viens de voir, signe que le cinéma d'animation, quand il est entre les mains de tels artistes, a encore de magnifiques jours devant lui.